FRDI0059
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Agences de voyage: Chose promise, chose due

Les Français sont de plus en plus nombreux à s'adresser à une agence de voyages pour organiser leurs vacances. Solution simple et efficace, mais pas toujours sans mauvaises surprises. Fort heureusement le client n'est pas sans défense.
De la simple réservation d'un billet d'avion ou d'une chambre d'hôtel à l'inscription à un circuit touristique, l'étendue des services offerts par une agence de voyages est vaste. Son activité peut également s'étendre à l'organisation personnalisée d'un voyage pour lequel elle choisira les prestataires locaux qui assureront le transport, l'hébergement et les visites touristiques.
Quelle que soit la prestation, l'agence est responsable. Dans le cas de l'organisation d'un circuit, c'est elle qui est garante de son bon déroulement. Pour le client, ce principe est un gage de sécurité. En cas de problème, il pourra, une fois rentré chez lui, se retourner contre une société proche de son domicile et non contre une société étrangère et géographiquement éloignée. Les obligations de l'agent de voyage sont toutefois différentes selon la prestation effectuée.

Une obligation de résultat
En matière de réservations (transports, hôtellerie, location de voiture...), l'agence doit respecter ses engagements. Francis L., de Saint-Nom-la-Bretêche, s'était adressé à une agence Air France pour réserver deux billets d'avion pour cuba, un véhicule et une chambre d'hôtel à son arrivée. « A l'aéroport de La Havane, raconte-t-il, aucun véhicule n'était à notre disposition et à l'hôtel nos noms ne figuraient pas parmi les inscrits. Après discussion nous avons fini par obtenir une chambre, mais pas dans la catégorie initialement prévue. » Peu importe la raison des problèmes, Francis L. est en droit de se faire indemniser. Dans le cadre de son activité de réservation, l'agence est, en effet, tenue à une obligation de résultat : elle doit fournir le service promis et ne peut s'en exonérer même si elle n'est pas directement responsable du litige. Ainsi, une agence ne peut invoquer la carence d'une compagnie aérienne pour refuser d'indemniser ses clients suite à l'annulation d'un vol par le transporteur (cour d'appel de Paris 12.06.89 ).
Vol annulé ou retardé, hôtel non réservé, véhicule de location non disponible... commencez par exiger de l'agence qu'elle mette tout en oeuvre pour vous acheminer à destination ou vous trouver une chambre d'hôtel équivalente à ce qui était prévu. Si aucun remplacement n'est effectué ou si ces démarches ont gâché une partie de vos vacances et entraîné des frais, l'agence doit vous indemniser. A défaut d'accord amiable, vous pouvez saisir la justice.

L'agence est toujours responsable
M. et Mme P, se sont inscrits auprès de l'agence Orsud de Marseille pour une croisière de quinze jours en Turquie organisée par la société Marmara. « L'employé, affirme Bemard P., nous a assurés que nous ne serions pas plus de dix personnes par bateau. Or, au moment d'appareiller nous étions quinze plus l'équipage. Le bateau n'étant pas prévu pour tant de personnes nous nous sommes trouvés entassés dans les cabines et obligés de prendre nos repas sur nos genoux. » Furieux, les époux P. ont demandé à Orsud une indemnisation qui, après plusieurs courriers de réclamation, s'est soldée par 500 F par personne, bien peu à leurs yeux. Leur exigence était pourtant fondée : il y a bien faute de l'agence dans son devoir de conseil et de vérification des renseignements donnés sur les caractéristiques du séjour. En cas de promesses orales, faites-vous toujours confirmer par écrit les propos tenus.

Vue plongeante sur la terrasse
Pour se soustraire à leur responsabilité, nombre d'agences refusent les réclamations, arguant qu'elles ne sont qu'intermédiaires et non responsables des indications portées sur le catalogue d'un tour-opérateur. En fait, dès lors que l'agence vous propose une prestation (séjour, circuit ou autres) sans vous mettre directement en rapport avec un autre organisme, elle est responsable de tous les documents distribués.
L'agence Other Ways a ainsi dû indemniser ses clients pour avoir proposé la location d'une « villa de luxe » alors qu'il n'en était rien : pas de jardin comme promis, et la piscine n'était qu'un trou minuscule sur une terrasse où tous les immeubles avoisinants avaient une vue plongeante (cour d'appel de Paris 6.10.91).
L'agence de voyages doit tenir ses promesses, et notamment vérifier que les prestations proposées seront bien mises à la disposition des clients. La cour de cassation (arrêt du 25.01.89) a, en effet, admis qu'il y avait lieu de condamner pour « publicité mensongère et tromperie » l'agence de voyage qui avait envoyé plusieurs clients dans un village de vacances où ils n'ont pu bénéficier ni des équipements ni des prestations prévus, les travaux n'étant pas entièrement achevés. Il n'y avait, en effet, ni air conditionné ni équipements de loisirs.
Entre les visites touristiques ou culturelles telles qu'elles sont mentionnées dans certains dépliants et la réalité une fois sur place, la différence est parfois grande. Pour ne pas avoir respecté ce qui était décrit dans sa brochure, une agence s'est vu condamnée à 10 000 F d'amende et à dédommager les plaignants (cour d'appel de Paris 27.05.82 ) : aucun guide français ne les avait accompagnés lors de leur voyage en Jordanie et de nombreuses visites de sites avaient été annulées. Face à Semblables problèmes, demandez à l'agence de vous rembourser les prestations non exécutées ou n'ayant pas été remplacées. Si elle refuse, vous pouvez, là encore, saisir le tribunal.
S'il s'agit manifestement de publicité mensongère, vous pouvez également porter plainte auprès du procureur de la République pour que la société soit condamnée à une amende. Même si elle n'est pas l'éditeur du catalogue, l'agence qui vous a vendu la prestation est pénalement responsable (cour de cassation 11.05.87).

Des prestataires locaux plus ou moins sérieux
Depuis plusieurs années, Roger S. de Saint-Mandé organise bénévolement des voyages pour les personnes âgées de sa commune. Mais, cette année, le séjour en Floride, contracté par l'intermédiaire d'une agence, lui laisse de mauvais souvenirs : hôtel de basse catégorie, plusieurs personnes intoxiquées par une nourriture douteuse. Roger S. n'est pas sans défense. En invoquant le mauvais choix de l'hôtel, il peut se retourner contre l'agence qui lui a vendu le voyage et obtenir une indemnisation pour ceux qui ont supporté des frais médicaux et perdu ainsi plusieurs jours de vacances.
En effet, ce n'est pas parce que le préjudice subi est souvent le fait d'un prestataire local que le particulier se trouve démuni. Selon un arrêté du 14 juin 1982, les agences sont garantes de la bonne exécution du voyage, de la sécurité des participants et aussi des agissements de leurs prestataires de services. Responsabilité encore accrue par une loi du 10.07.92 où les agences de voyages sont présumées entièrement responsables. Une fois les décrets d'application de cette loi publiés, ce ne sera donc plus au client de prouver la faute de l'agence ; il lui surira d'apporter la preuve du préjudice subi.
Sans même attendre ces décrets, les juges reconnaissent déjà la responsabilité des agences du fait des agissements des prestataires locaux (transporteurs, hôteliers, guides, moniteurs de sport...). Rêv' Vacances a ainsi été condamnée à réparer le préjudice subi par un de ses clients. En vacances dans un club Baobab, ce dernier a été victime d'un accident à l'occasion d'une sortie en mer. La cour d'appel de Paris a reconnu la responsabilité de l'agence, la sortie en mer prévue au programme n'ayant pas été exécutée avec toute la compétence et la sécurité nécessaires à son bon déroulement (arrêt 11.03.93 ).
C'est également parce qu'elle n'avait pas suffisamment veillé aux conditions de sécurité que la société Marmara a été condamnée à indemniser les victimes d'un accident de car en Turquie (Cour de cassation 29.01.91). Le transporteur local roulait à vive allure sur une route qu'il ne connaissait pas, et il n'était pas accompagné d'un représentant expérimenté de l'agence.

Une girafe sur la piste
Une agence de voyages peut toutefois s'exonérer de sa responsabilité si l'événement qui a causé le dommage est dû à un cas de force majeure, par exemple un tremblement de terre ou une tornade. Encore faut-il qu'il soit imprévisible. Par exemple, l'irruption d'une girafe sur une piste du Kenya lors de la visite d'une réserve d'animaux n'est pas imprévisible et l'organisateur du voyage a été reconnu responsable de l'accident survenu aux touristes. Le chauffeur du groupe n'avait pas su rester suffisamment maître de son véhicule.
L'agence de voyages est, en effet, garante de la sécurité de ses clients. Même à l'hôtel, elle peut être tenue pour responsable si le bon déroulement du séjour n'est pas assuré. Tel est le cas d'un enfant qui s'était blessé en tombant sur des plantes épineuses lors d'une soirée organisée dans un hôtel de Majorque. Ses parents ont engagé la responsabilité conjointe de l'hôtelier et de l'agence qui leur avait vendu le voyage. A leurs yeux, les plantes épineuses nombreuses aux abords de la piste d'animation ne permettaient pas la sécurité des clients. Avis partagé par les juges qui ont reconnu que l'agence SOTAIR était tenue à la même responsabilité que l'hôtelier (Cour de cassation 15.01.91).

Si de telles mésaventures vous arrivent lors d'un voyage à l'étranger, réunissez le maximum d'éléments (témoignages, photos...) susceptibles de prouver la négligence de l'agence. S'ils sont suffisamment probants, vous pourrez lui demander une indemnisation pour le préjudice subi (remboursement de la prestation non assurée, plus éventuellement des dommages et intérêts). A défaut d'accord amiable, c'est à la justice de trancher.

Les conditions d'annulation d'un voyage:
Urgence professionnelle, maladie d'un proche, vol des papiers d'identité... autant de motifs qui peuvent vous obliger à annuler votre voyage. Quelle que soit leur légitimité, vous serez tenu d'indemniser l'agence. Le montant de l'indemnité est fixé dans le contrat que vous avez signé avec elle. Il varie en moyenne entre 25 % et 100 % du prix de la prestation, selon la date d'annulation. Toutefois, si l'événement survenu est un cas de force majeur (vous ne pouviez ni le prévoir ni l'éviter), vous êtes en droit de récupérer les sommes versées, mais ce critère sera difficilement admis.
Pour éviter ces déboires, souscrire une assurance annulation peut être utile. Mais l'assureur ne vous couvrira que pour un nombre limité de risques pouvant survenir avant le départ et seulement si vous respectez un certain formalisme. Pour connaître l'étendue de l'engagement de l'assureur, lisez attentivement le contrat proposé par l'agence et n'hésitez pas à poser les questions suivantes :
- Quels sont les événements garantis ?
Que faut-il entendre par maladie grave ? La maladie préexistante à la souscription du contrat est-elle couverte ?
Les complications liées à une grossesse sont-elles garanties ?
Que faut-il entendre par accident ? Quel doit être son degré de gravité ?
La maladie, l'accident ou le décès survenant à un proche entre-t-il dans la garantie ? Que faut-il entendre par « proche » ?
La perte d'emploi comprend-elle la démission, la mutation, tout type de licenciement ou uniquement le licenciement économique ?
Le vol des papiers d'identité est-il prévu ?
- Quels sont les justificatifs à transmettre en cas de demande d'intervention ?
Un certificat médical est-il suffisant ou faut-il également les photocopies des ordonnances et des décomptes de la Sécurité sociale relatifs au remboursement des frais de traitement ?
La visite d'un médecin agréé par la société d'assurance est-elle obligatoire et, en cas d'opposition, son refus entraîne-t-il la déchéance des droits ?
Dans quel délai et par quel moyen doit alors être informé l'assureur ?
- Quel est le montant de l'indemnisation ?
L'assurance annulation rembourse-t-elle intégralement l'agence de voyages ou cette indemnité est-elle plafonnée, le reste demeurant à la charge de l'assuré ?
Des frais de dossier sont-ils décomptés du montant de l'indemnisation ?
S'il vous semble que, selon votre contrat d'assurance, votre motif d'annulation est couvert et que vous avez respecté les formalités nécessaires auprès de l'assureur, plusieurs cas peuvent se produire. Si l'assureur ne répond pas à votre courrier, envoyez en recommandé une lettre le mettant en demeure de vous répondre sous huit jours. Sans réponse de sa part, vous devrez saisir la justice. Si votre assureur refuse d'intervenir au motif que le risque survenu est exclu du contrat, veillez à ce que cette exclusion ait bien été clairement indiquée sur le document que vous avez signé. A défaut, selon les articles L. 114-4 et L. 113-1 du Code des assurances, l'exclusion n'est pas valable et vous pouvez exiger l'intervention de l'assureur.

Agence de voyages Loisirs Voyages Que Choisir n° 307, 07-08/1994
© ADAGIO - CONSOMédia 1998 Démo