FRJP0078
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Démarchage à domicile: Nullité du contrat

« Attendu qu'il est constant que les époux G. ont été démarchés par M. H., représentant de la SARL M. ;
Attendu qu'il résulte des documents contractuels versés aux débats :
- qu'un bon de commande a été établi au nom de M. Daniel G. et signé par lui le 7 juillet 1990 en vue de l'acquisition d'une cuisine d'un prix de 80 000 F ;
- que le même jour une offre préalable de crédit émanant de la Sté Creg a été signée respectivement par Mme G. en qualité d'emprunteur et par M. G. en qualité de coemprunteur ;
- que le 3 août 1990 M. G. a signé un bon de commande établi à son nom en vue de l'acquisition de meubles de salle de bains pour le prix de 22 000 F un acompte de 4 000 F étant versé par le client ;
- qu'une offre préalable de crédit de l'UCB a été établie le 20 juillet 1990, en vue de financer la cuisine commandée le 7 juillet 1990 ;
- que le 21 septembre 1990 la Sté M., affirmant avoir installé la cuisine ainsi vendue, a demandé à l'UCB de lui verser les 80 000 F prêtés aux époux G., ce qui a été fait le 25 septembre 1990 ;
- que Mme G. a ensuite écrit à l'UCB pour faire connaître à cet organisme que c'est elle qui avait contracté le prêt et non son mari, pour préciser que les échéances devaient être prélevées sur son compte privé et pour demander que lui soit précisé le montant des mensualités à payer ;
- que par une lettre de leur avocat de première instance en date du 4 décembre 1990, les époux G. ont mis en demeure I'UCB de leur fournir les pièces les liant à cet organisme ;
- qu'ayant reçu les documents demandés, ils ont le 14 janvier 1991 indiqué à l'UCB que les signatures portées sur l'offre de prêt du 20 juillet 1990 étaient fausses, et ont fourni un exemplaire de leur signature ;
- que néanmoins, l'UCB a adressé aux époux G. le 20 février 1991 une correspondance leur faisant connaître que la première mensualité d'un montant de 1353,04 F viendrait à échéance le 20 mars 1991, un tableau des échéances étant annexé à ce courrier ;
Sur la nullité des contrats de vente conclus avec la société M. :
Attendu que l'article 2 de la loi n° 72-1137 du 22 décembre 1972 ( L. 121-23 du Code de la consommation) dispose que le contrat remis au client au moment de la conclusion du contrat doit à peine de nullité comporter notamment les mentions concernant le prix global à payer et les modalités de paiement, et en cas de vente à crédit le taux normal de l'intérêt et le taux effectif global déterminé dans les conditions prévues par la loi du 28 décembre 1966 sur l'usure ;
que ce même texte impose que figure sur le contrat la faculté de renonciation prévue à l'article 3 de la loi, ainsi que les conditions d'exercice de cette faculté et de façon apparente le texte intégral des articles 2-3 et 4 de la loi ;
que le contrat doit en outre comprendre un formulaire détachable destiné à faciliter l'exercice de la faculté de rétractation ;
Or attendu que le simple examen des bons de commande des 7 juillet 1990 et 3 août 1990 démontre que les mentions prescrites à peine de nullité ont été omises par la société M. et que l'encadré destiné à l'annulation de la commande ne répond pas aux exigences légales ;
Attendu au surplus que la lecture du bon de commande du 3 août 1990 fait apparaître encore que la Sté M. a contrevenu aux dispositions de l'article 4 de la loi précitée du 22 décembre 1972 qui interdit la perception par le vendeur de la part du client d'une quelconque somme, contrepartie ou engagement avant l'expiration du délai de réflexion de sept jours édicté par l'article 3 ; qu'il n'est pas contesté qu'un acompte de 4 000 F a été versé le 3 août 1990 lors de la signature du bon de commande ;
Attendu qu'il suit qu'il y a lieu de déclarer nulles les deux ventes conclues dans ces conditions ; qu'il est en effet inopérant que les acheteurs se soient prévalus de cette nullité postérieurement à la livraison, alors que les écritures des appelants non contestées par la Sté M. et son liquidateur révèlent que les clients ont refusé de signer le bon de livraison pour non-conformité des marchandises commandées, cette non-conformité étant elle-même démontrée par l'expertise effectuée en vertu de l'exécution provisoire et en exécution du jugement du 28 octobre 1991;
Sur la nullité du contrat de prêt conclu avec l'UCB le 20 juillet 1990 :
Attendu qu'en cas d'offre de crédit affecté au financement de l'acquisition d'un bien ou à la fourniture d'une prestation de service, l'article 9 de la loi n° 78-22 du 10 janvier 1978 ( L. 311-21 du Code de la consommation ) relative à l'information et à la protection des consommateurs dans certaines opérations de crédit, dispose que lorsque le contrat principal est résolu ou annulé, le contrat de prêt est lui-même résolu ou annulé de plein droit ; que par suite, le contrat de vente de la cuisine ayant été déclaré nul il y a lieu de déclarer également nul le contrat de prêt liant les époux G. à l'UCB, sans qu'il soit besoin de mettre en oeuvre une procédure de vérification d'écritures ou d'ordonner une expertise graphologique ; qu'au demeurant et surabondamment, la comparaison des signatures figurant sur les bons de commande et l'offre de crédit Creg avec les signatures apposées sur l'offre de crédit litigieuse du 20 juillet 1990 démontre de façon évidente et contrairement à ce qu'a jugé le tribunal d'instance dans son premier jugement du 8 juillet 1991, que les signatures des époux ont été grossièrement imitées ;
Que par ailleurs, il est curieux de constater que cette offre est datée du 20 juillet 1990 alors que le contrat de vente concernant cette cuisine a été passe le 7 juillet 1990 et que le même jour les époux G. ont signé auprès de la Société Creg une offre préalable de crédit auquel il n'a pas été donné suite ; que par ailleurs, si ce document, qui mentionne expressément le montant de la mensualité due soit 1311,76 F, avait été signé par les appelants, il n'aurait pas été nécessaire que Mme G. s'enquiert auprès de l'UCB du montant des mensualités à prélever sur son compte, étant précisé que sur cette offre de crédit, c'est le mari qui figure en qualité d'emprunteur, alors que sur l'offre de crédit Creg signée le 7 juillet 1990 c'est Mme G. qui a la qualité d'emprunteur, ainsi qu'elle l'a fait observer à l'UCB.
Sur les conséquences de l'annulation des contrats litigieux :
Attendu que les contrats de vente et de prêt étant déclarés nuls, il y a lieu de replacer les parties dans la situation où elles se trouvaient avant leurs conclusions et de dire que les parties devront en tirer toutes les conséquences de droit... ».

[CA Metz, Ch. civ. 3 déc. 1992]

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