FRJP0102
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Tromperie: Contrôle technique

Le garagiste qui effectue un contrôle technique peut être condamné pour tromperie.

« Considérant que le 1er mars 1990, Jean-Claude S. achetait à un particulier, M. Tang S., un véhicule de marque Renault Saviem pour la somme de 34 000 F ; que le vendeur lui remettait la fiche de contrôle technique établie le 28 février 1990 au garage « L. » agent Renault à Brétigny-Sur-Orge (91), ladite fiche portant la mention « bon état général » et ne signalant aucune défectuosité qui aurait impliqué une remise en état, qu'elle soit « immédiate » ou « dès que possible » ;
que Jean-Claude S., qui avait essayé le véhicule une dizaine de minutes, ne constatait aucune anomalie au moment de la vente ; que, toutefois, rentrant chez lui, à bord de la camionnette aussitôt après la transaction, il aurait été, au moment où il freinait en raison d'un encombrement sur l'autoroute A 6, déporté vers la voie de gauche, dans l'incapacité de maîtriser son véhicule, et aurait manqué de percuter d'autres voitures ; qu'il résulte également des déclarations de l'acheteur qu'après être retourné chez lui à faible vitesse, il n'avait pu faire redémarrer le véhicule et qu'il avait été contraint de le faire remorquer et réparer au garage V. à Itteville (91) ; qu'il a produit une facture de cette entreprise, en date du 8 mars 1990 pour un montant total de 4 570,32 F, qui fait état du changement de démarreur ; que le lendemain, soit le 9 mars, la partie civile faisait procéder à un second contrôle technique par le garage C. à Corbeil ; qu'il a alors été constaté que le véhicule présentait de nombreuses anomalies, notamment un jeu anormal de la rotule supérieure avant droite, de la colonne et des relais de direction et du triangle supérieur avant-gauche ainsi qu'un desserrement de la transmission centrale ; que cette seconde fiche de contrôle mentionnait que les freins n'avaient pu être essayés, le véhicule n'étant pas en état de marche, et qu'étaient cochés comme nécessitant une remise en état immédiate, des éléments du châssis, de la suspension, de la direction et de la transmission ;
Considérant que Jean-Claude S. ayant porté plainte pour ces faits, le prévenu, président de la société gestionnaire du garage « L. » à Brétigny-sur-Orge, était entendu le avril 1990, par les enquêteurs ; qu'il déclarait que son entreprise ne disposait pas de bancs de contrôle pour la suspension, les amortisseurs et le freinage, que le seul certificat technique pratiqué était celui du décélérographe pour tester l'efficacité du freinage et pour le reste, le simple contrôle visuel ne permettait pas de mesurer le degré d'usure des pièces ; qu'il ajoutait qu'en l'espèce, le graphisme du décélérographe et que M. D., son préposé, qui avait procédé au contrôle, avait remarqué quelques anomalies mais ne les avait pas mentionnées, estimant qu'il n'y avait pas urgence ;
Considérant qu'il résulte de la fiche technique établie le 28 février 1990 au garage « L. » qu'y est portée la mention « bon état général », sans autre observation ou commentaire ; que dans la partie de la fiche concernant les défauts relevés impliquant une remise en état, aucun élément n'a été coché alors que cette camionnette avait plus de dix ans ; que le prévenu ne saurait s'appuyer, pour expliquer ces lacunes, sur le fait que le contrôle technique doit être effectué sans démontage, puisque le second contrôle technique effectué dans les mêmes conditions, a montré non seulement que des anomalies importantes affectaient la sécurité du véhicule (organes de direction notamment), mais que de nombreux éléments nécessitaient une remise en état immédiate ;
Que dès lors, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, la constatation par M. D. du « bon état général » du véhicule résulte soit d'une absence de contrôle, soit d'une dissimulation de graves dysfonctionnements, l'une ou l'autre de ces attitudes constituant une tromperie sur les contrôles effectués (et non sur les qualités substantielles de la marchandise ainsi qu'il est indiqué à tort dans la prévention et dans le jugement) ;
Considérant qu'il est indiscutable que Louis C., responsable du garage « L. », a conclu un contrat d'entreprise avec le vendeur du véhicule, lequel a été trompé, ainsi que l'acheteur, par la mention « bon état général », manifestement fausse, figurant sur la fiche technique ; qu'il a signé le « certificat de passage dans un centre de contrôle » annexé à la fiche technique attestant avoir visité le véhicule ; qu'il ne pouvait alors manquer d'observer que, mise à part la mention « bon état général », la fiche ne comportait aucune observation ou signalement, ce qui pouvait donner à penser que la camionnette était à l'état neuf alors qu'il n'en était rien ; qu'il aurait dû à l'évidence, exiger de son préposé que soient mentionnées sur ladite fiche de contrôle les anomalies que celui-ci avait constatées et dont il lui avait fait part, tout en les minimisant ; qu'en s'abstenant de le faire alors que sa qualité de chef d'entreprise lui faisait obligation de veiller personnellement à ce que les fiches de visite technique soient scrupuleusement remplies, sans que rien n'y soit omis, Louis C. s'est rendu coupable du délit de tromperie prévu et réprimé par l'article 1er de la loi du 1er août 1905 ( L. 213-1 du Code de la consommation) ;
Que sa responsabilité pénale est d'autant plus engagée qu'il dirige une entreprise habilitée à procéder au contrôle technique des véhicules prévu par la réglementation en vigueur, spécialisée dans la mécanique automobile et, qui plus est concessionnaire de la marque Renault qui est celle du véhicule litigieux ;
Considérant en conséquence qu'il échet, en réformant sur ce point le jugement attaqué, de donner aux faits leur exacte qualification et de déclarer Louis C. coupable d'avoir, à Brétigny-sur-Orge (91), le 28 février 1990 (et non le 1er mars 1990, ainsi qu'il a été mentionné à la prévention et dans le jugement), trompé le contractant sur les contrôles effectués sur un véhicule automobile ; qu'il convient également de réformer ledit jugement sur la peine et de faire au prévenu une application moins sévère de la loi pénale, le bulletin numéro 1 de son casier judiciaire ne mentionnant aucune condamnation ;
Sur l'action civile... »

[Paris, 13. Ch. Sect. B, 23 avril 1992]

L'article 1er de la loi du 1er août 1905 ( L. 213-1 du Code de la consommation) relative aux fraudes et falsifications est appliqué ici en référence à l'article 16 de cette même loi ( ( L. 216-1 du Code de la consommation) rajouté par la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 selon lequel « la présente loi est applicable aux prestations de services ».

Tromperie Contrôle technique Automobile
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