FRJP0107
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Démarchage à domicile: Abus de faiblesse

« Attendu que B. Catherine, épouse B. est prévenue d'avoir courant janvier et février 1991 à Le Mans et Saint-Mars-sous-Ballon (72) en tout cas depuis temps n'emportant pas prescription de l'action publique, abusé de la faiblesse ou de l'ignorance de Raymond M. et Marcelle L., âgés de plus de 72 ans, pour leur faire souscrire par le moyen de visites à domicile, des engagements au comptant sous la forme de signatures de bons de commande et chèques bancaires respectivement pour 6 880 F et 12141,66 F.
Attendu que l'enquête préliminaire et les débats ont permis d'établir que Mme B. se livrait au démarchage à domicile en vue de vendre du vin aux particuliers ;
Qu'à la suite de la plainte de deux consommateurs la Direction Générale de la Concurrence et de la Consommation a établi un procès-verbal de délit où plusieurs infractions ont été relevées, notamment celle d'abus de faiblesse ou d'ignorance à l'égard des deux plaignants ;
Attendu que M. M., âgé de 72 ans au moment du démarchage, a pris commande le 31 janvier 1991 de 48 bouteilles de Châteauneuf du Pape pour la somme de 8160 F, soit 170 F la bouteille ;
Que l'intéressé relevait alors d'une opération chirurgicale qui l'avait physiquement amoindri ;
Qu'il a déclaré avoir signé le bon de commande « sans trop regarder », pressé par un rendez-vous chez son médecin autant que par l'insistance des démarcheurs ;
Attendu que Mme Marcelle L., âgée de 78 ans, a pour sa part pris commande le 16 janvier 1991 de 50 bouteilles de Côtes du Rhône pour une somme de 7 200 F correspondant à un prix de 120 la bouteille ;
Qu'entre temps, Mme B. est parvenue à la convaincre par téléphone, de compléter cette première vente par l'acquisition de 48 bouteilles supplémentaires (24 de St-Emilion, 12 de Bordeaux rouge, 12 de Grand Roussillon) au prix de 7 200 F, qui aboutissait à doubler le prix de la commande initiale ; que le tout a été livré à la cliente le 30 janvier 1991 ; que pour cette dernière transaction, le prix de la bouteille de Saint-Emilion était facturé 200 F, celui de la bouteille de Bordeaux (château Le Bret) 100 F et celui de la bouteille de Grand Roussillon (Valmidor) 100 F également ;
Attendu que les éléments de l'enquête ont révélé que le couple M. n'avait pas un mode de vie ou des fréquentations justifiant la nécessité de commander du vin en aussi grande quantité ; qu'il en est a fortiori de même de Mme L., personne vivant seule et ne consommant pas de vin ;
Attendu que les prix pratiqués apparaissent par ailleurs exorbitants par rapport à la qualité du vin vendu ;
Qu'en outre, Mme B. s'est permis de facturer à Mme L. des prix supérieurs à ceux indiqués dans le catalogue clients, répertoriés dans le PV de la Direction Générale de la Concurrence et de la Consommation ;
Attendu que Mme B. a été incapable de donner la moindre explication cohérente qui eut permis de comprendre les raisons d'achats aussi importants effectués à des conditions aussi peu avantageuses et dans une précipitation pour le moins suspecte ;
Attendu que Mme B. ne peut sérieusement contester s'être servie de l'âge et de la faiblesse de ses clients pour leur vendre des marchandises dont ils n'avaient nullement besoin - en cette quantité tout au moins - et à des conditions avantageuses pour le vendeur seul ;
Attendu que l'infraction retenue à la charge de Mme B. est parfaitement constituée ;
Qu'il y a lieu d'entrer en voie de condamnation à son encontre, tout en lui accordant le bénéfice des circonstances atténuantes ;
Sur l'action civile :
Attendu que M. Raymond se constitue partie civile par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 5 mars 1992 ;
Attendu que M. Raymond demande au tribunal la condamnation de B. Catherine épouse B. à lui payer la somme de 7 125 F à titre de dommages-intérêts ;
Attendu que Mme L. Marcelle se constitue régulièrement partie civile par Maître ... avocat ;
Qu'elle demande au tribunal condamnation de Mme B. Catherine à lui payer la somme de 5 000 F à titre de dommages-intérêts...
Attendu que Mme B. Catherine épouse B. est tenue de réparer l'entier préjudice subi par les parties civiles ;
Attendu que les demandes présentées par les parties civiles sont fondées ; que les dommages-intérêts qu'elles sollicitent seront réduits à la somme de 3 000 F pour chacune d'entre elles ; »

[TGI Poitiers 24 juin 1992]

Voir 313-4 du Code pénalet L. 122-8 à L. 122-10 du Code de la consommation) .

Démarchage à domicile Abus de faiblesse
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