FRDI0066
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Carte bancaire: Problèmes divers

Délivrance et renouvellement

- Ce que les banques s'autorisent
Un instant d'inattention, une minute de distraction, et hop ! Les banques en profitent pour essayer de facturer en douce à leurs clients quelques frais supplémentaires par-ci, une nouvelle tarification par-là... Une seule solution : la vigilance et une contre-attaque rapide. « Le Crédit agricole d'Alsace me propose de remplacer ma carte bancaire (Carte bleue) qui arrive à échéance par la carte Eurocard Mastercard rapporte ainsi Marcel L., de Riedseltz (67). Mais on ne me demande pas si je la désire, on me demande d'écrire si je ne la désire pas. En admettant que ma lettre ne parvienne pas à destination, ou que je sois en vacances lors son arrivée, je me verrai gratifier de cette Eurocard sans l'avoir demandée... »
Autre banque, mêmes pratiques, la Poste propose (ou impose ?) à ses clients une Carte bleue en échange de la Carte 24/24. « Attention, sans intervention de votre part la Carte bleue à l'essai pendant un an vous sera délivrée fin novembre, écrit la Poste à Gérard O., d'Auxerre (89). Elle se substituerait à votre carte 24/24 »
Ce que la banque ne dit en général pas très clairement, c'est que la nouvelle carte coûte, en général, plus cher que l'ancienne.
Mais le plus fort, c'est qu'après vous avoir ainsi forcé la main, les banques peuvent encore vous reprendre votre carte sans motif ni préavis. En effet, une carte bancaire appartient à la banque émettrice, qui peut décider à tout moment de la retirer à un titulaire de compte ou de refuser son renouvellement. Cette décision pourra être notifiée par lettre simple, et le client ne devra plus, dès lors, faire usage de sa carte.

- Ce qu'en pense Que choisir
N'ayons pas peur des mots : ces pratiques, assimilables à de la vente forcée, sont illégales. Aux termes de la recommandation de la commission des communautés européennes du 17 novembre 1988, les cartes de paiement ou de retrait ne doivent être remise à la clientèle que sur demande préalable de sa part. La délivrance forcée d'une carte peut engager la responsabilité de la banque (décision du Tribunal d'instance de Juvisy-sur-Orge, 2 7 avril 1990, inédit).
La loi du 18 janvier 1992 ( voir article L. 122-3 du Code de la consommation) renforçant la protection des consommateurs donne de nouvelles armes pour se défendre. Tout prestataire de service qui a indûment perçu un paiement d'un consommateur sans engagement exprès et préalable de ce dernier est tenu de restituer ces sommes qui sont productives au taux d'intérêt légal.
A contrario, une banque peut parfaitement refuser, sans avoir à formuler de motifs, de délivrer une carte. La charte des services bancaire de base prévoit toutefois que les établissements adhérents doivent proposer au minimum une carte de retrait à l'ensemble de leurs clients.
Mais cette carte peut être limitée aux seuls distributeurs du réseau de la banque émettrice.
La délivrance d'une carte bancaire nécessite un contrat écrit, précisant la date d'émission et les conditions d'utilisation. Une cotisation annuelle sera ensuite prélevée d'office sur le compte concerné. Les conditions du contrat peuvent être modifiées en cours d'utilisation, et sont applicables dès qu'elles ont été notifiées au titulaire du compte (recommandation européenne, point 3.5). Celui-ci dispose d'un délai d'un mois pour contester ces modifications, faute de quoi son acceptation sera considérée comme tacite.
De manière générale, le contrat est conclu pour une durée d'une ou deux années. Le client qui ne souhaiterait pas le renouveler doit en avertir sa banque deux ou trois mois avant la date d'échéance, faute de quoi le contrat sera prolongé par tacite reconduction.

- Comment contre-attaquer
Si vous avez été victime de ce type de « vente forcée », envoyez à votre banquier la lettre recommandée suivante (avec accusé de réception).

Madame, Monsieur,
A ma grande surprise, j'ai constaté sur mon relevé de compte que vous m'avez prélevé... francs, au titre d'une carte ..., que je n'ai jamais demandée.
J'estime que vous m'avez prélevé ces sommes sans accord exprès et préalable et en respect de l'article L. 122-3 du Code de la consommation (art. 7 de la loi du 18 janvier 1992) , je vous mets en demeure de recréditer mon compte du même montant, majoré des intérêts légaux à la date du prélèvement.
Sans réponse de votre part je saisirais le tribunal d'instance.
Je vous prie d'agréer...

Règlement par carte

- Ce que les banques s'autorisent
Commander par téléphone ou par minitel et payer grâce à sa carte de crédit... Cette opération, pour pratique qu'elle soit, présente un certain nombre de risques. « Quelqu'un a utilisé à deux reprises mon nom et mon numéro de carte visa pour commander par téléphone, depuis Bruxelles, des places de théâtre à une agence de Londres, raconte ainsi Catherine C., de Courbevoie (92). Or, aux dates auxquelles ces commandes ont été faites j'étais à Paris, et je peux le prouver. Mais, contrairement aux assurances qui m'avaient été données par ma banque, ces sommes m'ont été débitées. Comment puis-je les récupérer ? »

- Ce qu'en pense Que choisir
Pour les règlements de commandes par Minitel ou téléphone, le contrat qui lie la banque au commerçant prévoit qu'en cas de contestation du porteur de la carte, et en l'absence de factures signées, la banque du commerçant doit créditer la banque du porteur, et donc le compte du consommateur « contestataire ».
Si la banque ne veut rien entendre, exigez qu'elle vous produise la facturette ou son double portant votre signature. En l'absence de ce document écrit, elle aura du mal à prouver votre responsabilité et devra vous rembourser.
Depuis le 1er janvier 1993, les commerçants sont invités à refuser une Carte bleue française qui ne serait pas équipée d'une puce - dernière étape avant d'exiger (pour quand ?) la frappe systématique du code confidentiel. Et pour cause : la frappe du code sur un terminal de paiement électronique constitue une signature informatique (cassation civile, 8 novembre 1989). Sauf perte ou vol déclaré, elle est donc censée émaner du titulaire. Si votre code est utilisé à votre insu, tous les achats et retraits sont considérés comme émanant de vous. C'est le talon d'Achille du système ; la divulgation ou, surtout, la subtilisation du code confidentiel (et certains escrocs s'en font une spécialité) met aujourd'hui le client dans une situation périlleuse. La signature manuscrite est autrement protectrice, puisqu'elle impose au commerçant de vérifier la conformité de la signature apposée sur le ticket de caisse avec celle figurant sur la carte. A défaut, sa responsabilité serait engagée.

- Comment contre-attaquer
Par lettre recommandée avec accusé de réception.

Madame, Monsieur,
A la lecture mon relevé de compte, je constate que ma carte a été utilisée sans mon autorisation pour une commande à distance (préciser et joindre au courrier une copie du relevé). Une somme de ... F a été débitée de mon compte correspondant à des prestations que je n'ai jamais commandées.
Je vous demande de bien vouloir entreprendre toutes les démarches nécessaires et vous prie de bien vouloir créditer sans délai mon compte des sommes ainsi détournées. Je vous rappelle qu'aux termes de la recommandation du 17 novembre 1985 point 7-1, l'émetteur de la carte est responsable vis à vis du porteur des opérations non autorisées.
Je vous prie d'agréer...

Opposition

- Ce que les banques s'autorisent
Carte égarée, volée ? La prudence veut que le titulaire fasse aussitôt opposition. « un quart d'heure après le vol de mon sac à main, j'ai téléphoné au centre d'appel recommandé par ma banque, la BICS, pour faire opposition sur ma carte bleue », raconte Michelle M., de Choisy-le-Roi (94).
Hélas, cet appel n'a pas été pris en compte... « 48 heures après cette démarche, j'ai pu constater sur le minitel d'un commerçant qu'il n y avait aucune opposition sur mon compte. Je me suis donc rendue à la BICS où le gestionnaire de mon compte a rempli un dossier d'opposition, sans me remettre de duplicata. Malheureusement 24 heures plus tard ce dossier a été perdu. Il a donc fallu en établir un autre que l'employé a refusé de dater de la veille, m'affirmant que cela n'avait aucune importance. Cette fois, j'ai demandé une photocopie que l'on m'a fait payer ! »
L'opposition prononcée, le titulaire devra, le plus souvent, demander une autre carte. Une opération qui a aussi, un coût. « Ma carte était valide, je n'étais sous le coup d'aucun interdit et pourtant ma carte a été avalée par le distributeur de billet. J'ai lait opposition sans délai sachant qu'une carte avalée peut être récupérée par un tiers. Or à la lecture de mon relevé de compte, je m'aperçois que ma banque m'a facturé 150 F pour opposition et 250 F pour frais de saisie » proteste Yvonne S., de Salon de Provence (13).

- Ce qu'en pense Que choisir
Les 21 millions de cartes bancaires aujourd'hui en circulation génèrent chaque année plus d'un million d'incidents. Le vol de la carte est l'un des plus courants. Premier acte : l'opposition. De manière générale, cette procédure se fait en deux temps : primo, le titulaire de la carte téléphone au Centre d'appel carte bancaire ouvert 24 h sur 24 et 7 jours sur 7 ou à sa banque si celle-ci est ouverte ; secundo, il confirme aussitôt son opposition, comme l'exige la loi du 31 décembre 1991, par lettre recommandée avec accusé de réception. Si son coup de téléphone n'a pas été enregistré, l'opposition sera réputée avoir été effectuée à la date de réception de la lettre.
En ce qui concerne la perception de frais par la banque, n'hésitez pas à lui écrire pour en obtenir le remboursement.

- Comment contre-attaquer
Malgré l'insistance de Que choisir, l'opposition par téléphone ne donne lieu à la délivrance d'aucune attestation (sous forme d'un numéro d'opposition par exemple) qui pourrait être produite comme preuve en cas de litige.
Si le problème qui vous oppose à votre banque concerne la perception indue de frais, vous pouvez lui envoyer la lettre recommandée avec accusé de réception suivante :

Madame, Monsieur,
Ma carte n° ... a été avalée par le distributeur de billets ... (adresse), le ... (date), à la suite d'un dysfonctionnement de cet appareil. J'ai immédiatement fait opposition pour protéger mes droits. Or cet incident m'a été facturé ... F au titre de mon opposition.
Je vous rappelle que votre responsabilité est engagée, conformément à la recommandation européenne du 17 novembre 1988, point 7.1., pour non-exécution ou exécution fautive, même lorsque l'opération est effectuée sur un appareil dont vous n'avez pas le contrôle direct.
Aussi, je vous mets en demeure de bien vouloir me rembourser ces frais, faute de quoi, je ferais valoir mes droits devant les tribunaux.
Je vous prie d'agréer...

Responsabilité

- Ce que les banques s'autorisent
Cartes volées, cartes avalées par les distributeurs... ces incidents sont fréquents, et les responsabilités respectives du client et de la banque sont difficiles à établir. « J'ai introduit ma carte bleue dans la billetterie d'une agence toulonnaise du Crédit lyonnais j'ai tapé mon code et j'ai indiqué la somme que je voulais retirer, raconte ainsi Lucienne D., de Paris. L'argent n'est pas sorti j'ai essayé sans succès, de récupérer ma carte. J'ai attendu quelques instants, j'ai répété l'opération, sans plus de résultat. Ma carte a bien été avalée. Le jour même une somme de 4 800 F a été retirée dans cette même agence et 1 800 F dans une autre... Or mon plafond de retrait n'est que de 3 000 F. »
Face à ce type d'incident fréquent, la parade des banques est toujours la même ; « Si quelqu'un a pu retirer de l'argent avec votre carte c'est que votre code confidentiel y était joint », répondent-elles en substance. Bien souvent, la bonne foi des utilisateurs ne peut pourtant pas être mise en cause. Et ces personnes sont parfois victimes d'escrocs bien organisés qui subtilisent code et carte à l'insu du porteur.

- Ce qu'en pense Que choisir
Le client est-il nécessairement suspect ? Traditionnellement, la réponse des banques allait dans ce sens. L'affirmation selon laquelle le code secret était inviolable leur permettait de se dégager de toute responsabilité. Jusque-là considéré comme un coupable en puissance, le client bénéficie aujourd'hui de la présomption d'innocence. La cour d'appel de Versailles a été la première, dans un arrêt du 21 décembre 1990, à considérer que la négligence du titulaire devait être prouvée, et non pas présumée, à partir de retraits effectués dans un distributeur. Un an plus tard, la cour de cassation rendait à son tour un arrêt (Cass. Com. 8 octobre 1991) qui précise que c'est à la banque d'apporter la preuve que le client a commis une impudence dans la garde de son code confidentiel.

- Comment contre-attaquer

Par lettre recommandée avec accusé de réception que vous envoyez à votre banquier (bien entendu, nous supposons que vous avez déjà confirmé par écrit votre opposition).

Madame, Monsieur,
Je vous rappelle que le... (date), à la suite d'un dysfonctionnement du distributeur automatique situé ... (adresse), ma carte a été avalée puis utilisée frauduleusement par un tiers pour des retraits et des paiements (détaillez les joignant la copie de vos relevés).
Or j'atteste que je ne pouvais être l'auteur de ces relevés puisque je me trouvais à ... (lieu), à l'heure indiquée.
D'autre part je déclare sur l'honneur n'avoir commis aucune imprudence dans la garde du code.
Aussi, je vous mets en demeure de recréditer mon compte des sommes indûment débitées, faute de quoi je saisirais les tribunaux pour faire valoir mes droits.
Je vous prie d'agréer...

Carte bancaire Banque Opposition Que Choisir n° 291, 02/93
© ADAGIO - CONSOMédia 1998 Démo